En endossant les habits du sculpteur et de l'explorateur, Guillaume Barth produit des formes fixes et cependant inscrites dans une dynamique, en ce sens qu'elles apparaissent pour certaines d'entre elles selon une approche entropique, dans une unité de temps et d'action, tandis que d'autres participent d'un déroulement de longue haleine. Par cette démarche qui privilégie le cycle comme moyen de faire et aussi la circularité comme forme et le circuit comme dispositif, des fictions émergent selon des logiques internes et autonomes qui finissent toujours par trouver une issue, par s'ouvrir, si ce n'est par se disloquer. À ce titre, Après le noir (2016) consiste en l'aboutissement d'un projet qui adopta autant de formats que d'occasions de mutation. Et si tout a commencé ailleurs, alors tout semble pouvoir s'achever ici : la cuve dressée en équilibre sur sa tranche, éventrée, vide de toute substance mais pleine d'un fond d'or, donne à voir les entrailles de son corps qui, précédemment dans sa généalogie, n'apparaissait qu'en tant qu'organe fonctionnel ou symbolique. Et tandis que le reliquat de noir des précédentes étapes a été mis en bouteilles, la sculpture, rayonnante de son intérieur, par l'effet d'une opération alchimique de transformation de ses constituants, accède à une identité lumineuse et à une présence adressée. Mais pour combien de temps ? Car la pratique de Guillaume Barth se soucie d'user la durée. À ce propos, le Projet Elina (2013-2015), dont le nom évoque la composition en lithium et en sodium du sol d'un désert en Bolivie, présenté par une vidéo et une photographie dans des dimensions équivalentes entre l'image arrêtée et l'image en mouvement, s'est attaché à rendre possible l'existence d'une architecture inouïe. Installée sur un miroir d'eau de pluie, empruntant à l'image d'un igloo, construite avec des briques de sel, elle apparaît telle une double sphère unifiée entre ciel et terre et comme un deuxième monde au cœur de celui qui l'a vu naître. Prête à disparaître, elle est à l'avenant du corpus de ces autres récits de formes dont le temps de vie se développe et se saisit dans le temps même de leur révolution.
 

— Mickaël Roy,